Présenté au salon Habitat-Jardin, à Lausanne, le concept de maison intelligente de Romande Energie relève d’une domotique de nouvelle génération: un système ouvert qui réunit tous les services et objets sur une seule plateforme et assure un suivi personnalisé. De quoi relancer la question de la protection de la sphère privée.

 

Toute la maison dans le creux de la main, sur l’écran d’un smartphone. Seul l’index pour orchestrer l’éclairage, la température et l’équipement électronique dans différents espaces. Un conseiller virtuel à l’affût de vos gestes et habitudes pour gérer de manière optimale la consommation d’énergie, prendre des mesures de sécurité et satisfaire vos désirs avant même que vous ne les formuliez. Ce n’est pas de la science-fiction ni de la domotique haut de gamme pour villa hollywoodienne, mais un concept de smart living que Romande Energie veut rendre accessible dans un futur proche.

Dans le cadre du salon Habitat-Jardin, qui se tient jusqu’au 11 mars à Lausanne, l’entreprise présente sa vision de la maison intelligente, conçue par le SmartLab, son incubateur d’innovations sur le site de l’EPFL. Les volontaires sont invités à participer au développement du système en le testant gratuitement.


Fonctionnalités sur mesure

«Nous voulons proposer une solution allant au-delà de ce qui existe dans la domotique: une plateforme qui réunit tous les services et objets connectés et les gère de façon efficiente en fonction des besoins et des habitudes du client. Nous tenons à collaborer avec l’utilisateur pour mettre au point des fonctionnalités sur mesure», explique Federico Quevedo, responsable du projet Smart Living. Les bénévoles, si leur habitat remplit certaines conditions, y verront installer quelques capteurs et un boîtier, le «cerveau» du foyer désormais intelligent qui communiquera avec les habitants via une application.

Celle-ci propose une vue d’ensemble de toute la domotique – de la consommation d’énergie dans chaque pièce jusqu’aux appareils électroménagers, – et met en scène un interlocuteur virtuel prêt à aider. Vous partez bientôt en vacances? Il se chargera de couper le chauffage, de désactiver les prises, de simuler une présence humaine avec de la lumière et de déclencher une alarme si nécessaire. Evidemment, l’ambiance habituelle sera rétablie au retour des occupants.

«La box est capable d’apprendre la façon dont on utilise la maison et s’adapte au mode de vie du consommateur, dit Federico Quevedo. On peut imaginer des notifications personnalisées pour les familles avec enfants ou les personnes âgées et optimiser la consommation d’énergie.»


Baisse de consommation à la clé

La nouvelle génération de domotique helvétique est en effet encore plus soucieuse d’économie d’énergie, en conformité avec le cadre législatif posé par la Stratégie 2050. Les entreprises énergétiques sont de plus en plus nombreuses à inclure la gestion intelligente dans leurs prestations avec, à la clé, une baisse de la consommation.

La grande nouveauté du Smart Living de Romande Energie par rapport aux solutions existantes, expliquent les responsables, est que le système combine les informations fournies par différents appareils pour développer un suivi personnalisé et facilite la gestion à partir d’une seule interface. Mais surtout, il est «ouvert», c’est-à-dire compatible avec un grand nombre de marques.

Systèmes ouverts

Un grand atout, confirme Sébastien Bergin, président de la Fédération suisse de domotique: «Ces protocoles ouverts laissent le libre choix au client et garantissent la pérennité des installations puisqu’ils ne sont plus dépendants d’un nombre restreint de fournisseurs. Par ailleurs, cette approche a fait baisser le prix de la domotique, la rendant plus accessible.»

L’ouverture des protocoles est l’un des principes inscrits dans la charte éthique de la Fédération, qui profite du salon lausannois pour présenter sa vision aux professionnels et familiariser les usagers avec les enjeux de la maison intelligente. Pour Sébastien Bergin, l’avenir appartient aux systèmes ouverts, «qui n’emprisonnent pas le client dans un univers clos et favorisent les rapports d’entraide plutôt que de concurrence entre les prestataires: le marché de demain sera bien plus grand que l’offre existante».


Un label pour promouvoir l’ouverture

Dans cette optique, la faîtière a créé le label Smarthome Ready Device, qui estampille appareils et équipements susceptibles d’être connectés à des plateformes ouvertes. Cette solution permet aussi de réunir plus facilement toute la domotique sur une seule interface, plus simple à utiliser.

Pour les professionnels du domaine, il ne fait guère de doute que la domotique se fera une place de choix dans les immeubles de demain. L'intérêt des géants comme Apple, avec son HomeKit géré par l'application Maison, confirme la tendance. Selon l’estimation du cabinet suédois Berg Insight, en 2020, l’Europe comptera plus de 45 millions de maisons connectées, soi quatre fois plus qu’en 2015. En Suisse, selon Sébastien Bergin, c’est le vieillissement de la population annoncé par les statistiques fédérales qui servira de marchepied à la domotique, avec son potentiel d’économies en matière d’assistance et la possibilité pour les personnes âgées d’habiter plus longtemps chez elles de façon autonome.

« Il faut se demander jusqu’où on est prêt à aller en contrepartie d’un service personnalisé, dans quelle mesure on a besoin de rendre notre maison intelligente »

  • Sébastien Bergin, président de la Fédération suisse de domotique


«En France, certains maîtres d’ouvrage incluent déjà la gestion smart dans leurs appels d’offres, dit Sébastien Bergin. La domotique devient une norme, et avec les évolutions du XXIe siècle, la valeur du bâtiment dépendra davantage de son intelligence que de son emplacement.»

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Reste la question sensible: quelle protection pour les données? Car la maison connectée sera au courant de la vie privée de ses habitants pour mieux prévenir leurs désirs. Les concepteurs de par le monde promettent des garde-fous. Le président de la Fédération suisse de domotique se montre philosophe: «Plus on partage d’informations personnelles avec des objets connectés, mieux ils apprennent à nous connaître. Mais il faut se demander jusqu’où on est prêt à aller en contrepartie d’un service personnalisé, dans quelle mesure on a besoin de rendre notre maison intelligente. C’est à l’utilisateur de trouver le juste équilibre entre ce qu’il donne comme informations et ce qu’il reçoit en retour.»

Olga Yurkina, Publié mardi 6 mars 2018 à 19:20

Source : https://www.letemps.ch/economie/lart-smart-living-lhelvetique